John Alec Baker | Biophilia n°18
Postface et révision de la traduction par Francis Tabouret
Ce livre est né de dix années d’affût, et d’un si long regard que l’œil qui observait s’est peu à peu identifié à l’oiseau qu’il pourchassait.
Chasseur pacifique, chasseur d’images, qui a épié les faucons pèlerins dans une vallée débouchant sur les marécages de l’estuaire de la Tamise, entre octobre et avril, quand les étangs désertés se chargent des brumes et des silences de l’automne, des soleils pâlis et des drames de la nature, et qui, à son tour devenu proie, s’est fondu dans le paysage mouillé, s’est fait lui-même roman, journal, livre de nature, poème-jeté, comme l’oiseau, point dans le ciel, parole dans le silence.
John Alec Baker (1926-1987) est né et a vécu toute sa vie à Chelmsford, une petite ville au nord-est de Londres et de l’estuaire de la Tamise dans le comté d’Essex. Elle est entourée de ces bocages, de ces bois, de ces marais qui sont le décor du Pèlerin.
Ce livre, d’abord publié au Mercure de France, en 1968, était épuisé, nous le rééditons enrichi d’une postface de Francis Tabouret, dans la traduction d’Élisabeth Gaspar, revue.
C’est par sa prose, ardente, précise, piquée de métaphores éclatantes ou terre à terre, que Baker parvient à dire combien le monde venant avec l’oiseau, porté par lui, est exceptionnel. L’élan et la clarté de son écriture effectuent sur la page ce que le pèlerin lui permet lorsqu’il le regarde : sortir de soi-même.
Claude Grimal, Extase du vol, EaN, 4 novembre 2020