Éric Faye (3 décembre 1963, Limoges)
Éric Faye publie sa première fiction, Le Général Solitude, une nouvelle, dans la revue Le Serpent à Plumes en 1992. Trois ans plus tard, il développe cette nouvelle en un premier roman homonyme. Ses deux premiers livres, parus en 1991, sont un essai sur Ismail Kadaré et un recueil d’entretiens avec cet écrivain, réalisés à Tirana puis en France.
En 1998, son recueil de nouvelles fantastiques Je suis le gardien du phare, aux éditions Corti, obtient le prix des Deux Magots.
Suit un essai, chez le même éditeur, Dans les laboratoires du pire, consacré aux contre-utopies dans la littérature du XXe siècle, d’Orwell à Aldous Huxley et Ray Bradbury.
Dans un autre essai, Le Sanatorium des malades du temps, il étudie le rapport entre certains personnages de romans du XXe siècle (chez Thomas Mann, Dino Buzzati, Julien Gracq, Kobo Abe) et le temps.
Son deuxième roman, Parij, publié en 1997, est une uchronie située dans un Paris partagé en une zone occidentalisée et une zone communiste, en imaginant qu’en 1945, les Allemands, remportant la bataille des Ardennes, avaient retardé la progression des Américains et que la partie de l’Europe sous tutelle soviétique devint par conséquent nettement plus étendue qu’elle ne le fut dans la réalité.
Son œuvre, publiée par les éditions Corti et aux éditions Stock, se partage entre des nouvelles, le plus souvent à caractère absurde ou teintées de fantastique, des romans (dont le roman d’anticipation Croisière en mer des pluies, en 1999 - prix Unesco-Françoise-Gallimard), des essais et des récits, parmi lesquels Mes trains de nuit, puisés dans des voyages à travers l’Asie et l’Europe de 1982 à 2005.
Il publie en 2009, Nous aurons toujours Paris, dans lequel, en suivant le fil rouge du merveilleux depuis l’enfance, il évoque ses rencontres avec des écrivains (Ismail Kadaré, Julien Gracq).
En 2010, il se rend avec l’écrivain Christian Garcin en Iakoutie, descend la Léna jusqu’à son embouchure dans l’océan Arctique. Ils en tirent un récit, En descendant les fleuves - Carnets de l’Extrême-Orient russe. Depuis 2005, son œuvre s’oriente vers la littérature de voyage, en alternance avec des textes de fiction et des récits. Il participe à l’été 2012 à un voyage d’écrivains sur l’Ienisseï en Sibérie centrale, jusqu’à la zone d’accès restreint de Norilsk.
Ses nouvelles, comme celles du recueil Un clown s’est échappé du cirque, portent un regard souvent ironique et très critique sur le monde du travail et le libéralisme économique.
Éric Faye a dirigé un numéro sur Kafka (Autrement, 1996) et pris part à l’édition des œuvres d’Ismail Kadaré aux éditions Fayard. Il a participé à la rédaction des Mémoires de Jusuf Vrioni, Mondes effacés. Souvenirs d’un Européen, parus chez Jean-Claude Lattès. Il a également signé les préfaces d’œuvres d’Ismail Kadaré aux éditions Fayard, ainsi que de livres de Dominique Fabre (Le Perron), Xavier Hanotte (La Nuit d’Ors) ou de Joséphine Dedet (Géraldine, reine des Albanais).
Le 28 octobre 2010, il reçoit pour Nagasaki le grand prix du roman de l’Académie française1. Ce roman a été traduit par la suite dans une vingtaine de langues. En 2012, Éric Faye est lauréat de la Villa Kujoyama à Kyôto, période dont il tire un journal, Malgré Fukushima.
“Eric Faye, a publié une bonne vingtaine de livres en une petite vingtaine d’années, entrant dans la sphère littéraire par les éditions Corti et l’écrivain albanais Ismaël Kadaré.
Oscillant entre essais, nouvelles et romans, il écrit avec régularité, cherchant les marges et les lueurs d’absurde du quotidien.
Si ce journaliste de l’agence Reuters, né à Limoges, n’aime pas trop le grand jour, il a relaté la «genèse de ses élans» dans un récit autobiographique (Nous aurons toujours Paris, Stock) aux contours explicites et impassibles. Un faisceau de présomptions – attrait du merveilleux, images gravées de l’enfance, rencontres avec le texte puis l’écrivain, intérêt pour l’Albanie, pays sans représentation – a fait de Faye le dresseur de mots qu’il est.
Attentif au creux anodin du réel, peaufinant sa retranscription à destination du lecteur par une sourcilleuse mécanique qui lui confère une résonance.
Le temps paraît être une de ses obsessions,
sans doute son meilleur personnage.
«En des moments rares, le temps nous surprend à glisser, par une porte dérobée, des minutes inexplicables et pourtant capitales, lesquelles, mises bout à bout, ne doivent pas totaliser plus d’une heure ou deux dans une vie entière : collier d’instants dérisoires pour tout autre que soi mais qui donnent et redonnent envie, comme les prières récitées en suivant les grains du chapelet, de se hisser à la hauteur de soi-même»,
explique-t-il dans Nous aurons toujours Paris.
Ce jeudi matin-là, Eric Faye dit avoir du mal à parler de son dernier recueil paru, absorbé qu’il est désormais par ses écrits suivants. Son chrono littéraire continue de tourner, et pas la moindre superstition ne l’empêche de parler dans les détails de ce qui viendra après.”
Frédérique Roussel, Libération, 3 décembre 2009.
Lire la suite de l’entretien avec Éric Faye dans le document ci-contre.