Michel Collot | Les Essais (2014)
Depuis une vingtaine d’années, on a vu se multiplier les travaux consacrés à l’inscription de la littérature dans l’espace et/ou à la représentation des lieux dans les textes littéraires.
Cet intérêt pour les questions de géographie littéraire se situe dans le contexte du « tournant spatial » qu’ont connu les sciences humaines et sociales, mais aussi dans l’évolution des genres littéraires, caractérisée par une spatialisation croissante des formes poétiques et narratives (poésie spatiale, récits d’espace…), et dans le développement de pratiques artistiques liées au site (Land Art, performance...).
En proposant dans la première partie de cet ouvrage un panorama de ces travaux, Michel Collot, s’emploie à en définir les principales orientations, en distinguant approches géographiques, « géocritiques » et « géopoétiques », sans renoncer pour autant à les articuler pour constituer une véritable « géographie littéraire » capable de rendre compte des différentes dimensions de l’espace littéraire : la référence à des lieux réels, la construction d’un « univers imaginaire» ou d’un « paysage » et la spatialité propre au texte.
Il formule quelques propositions sur leur place et leur signification respectives, qu’il illustre dans la seconde partie de l’ouvrage par une série d’études situées à diverses échelles : celle de la production littéraire d’un continent à une époque donnée (l’Afrique noire postcoloniale), celle de l’œuvre complète d’un auteur (Supervielle, Butor, Silvia Baron Supervielle, Pierre-Yves Soucy), celle d’un ouvrage particulier (de Claude Simon ou de Jean-Christophe Bailly), voire celle d’un ou deux extraits significatifs (Barbey d’Aurevilly).
Pour explorer les multiples voies qu’une géographie littéraire est susceptible d’emprunter, il a tenu à la confronter à des genres divers : roman, nouvelle, poésie et récit de voyage, chacun d’eux appelant une approche différente. Les œuvres retenues s’étendent sur une période qui va du milieu du XIXe siècle à l’époque contemporaine et elles permettront aussi bien de s’arrêter dans une région comme le Cotentin que de voyager de l’Europe à l’Amérique, en Afrique ou en Australie. Mais on s’apercevra qu’importe moins la localisation des contrées évoquées que les structures spatiales qui leur confère une valeur et une signification et le rapport que chaque auteur entretient avec elles à travers l’image et la forme qu’il leur donne.”