Marius Daniel Popescu | Domaine français (2007)
Dès l'ouverture, limpide et poignante, de cette chronique polyphonique que constitue La Symphonie du Loup, le lecteur est saisi par la puissance expressive et narrative de l'auteur, évoquant initialement la scène capitale de son adolescence, au jour où lui fut annoncé la mort accidentelle de son père.
D'emblée aussi, la modulation vocale du récit, par le truchement de la voix du grand-père paternel, figure tutélaire faisant pendant à celle du père disparu, inscrit cette remémoration dans le flux et les rythmes d'une véritable épopée personnelle au temps du Parti unique. Dans cette Roumanie de la dictature du « socialisme réel » dont nous découvrons peu à peu le décor déglingué et la vie quotidienne, avec une frise de personnages hauts en couleurs dont la vitalité expansive colore et réchauffe un univers teinté d'absurde, Marius Daniel Popescu puise une substance romanesque effervescente, que son talent de romancier fixe en visions inoubliables, comme celle du cheval martyrisé. En contrepoint de ses rhapsodies «gitanes»proches parfois de la transe, se dessine le motif tout de douceur et de délicatesse de la vie présente de l'écrivain, où le fils éperdu se reconstruit dans son rôle de père attentionné et de «loup» pacifié.
Il y a comme une «chronique européenne» en raccourci dans ce grand récit alterné, profus et généreux, qui brasse plusieurs cultures et les expériences de plusieurs générations, finalement ressaisi dans l'unité d'une langue-geste originale.
Dans la sélection du Prix Wepler-Fondation La Poste 2007